Mathieu Martin |
Financement participatif en capital: Occasion du siècle ou attrape-nigaud?
De nos jours, les start-ups dans le secteur des technologies attendent de plus en plus longtemps avant de procéder à leur premier appel public à l’épargne (ou «Initial Public Offering», «IPO»), au grand malheur des investisseurs de microcaps. Les entreprises attendent tellement longtemps que lorsqu’elles font leur entrée en bourse, elles ont souvent dépassé il y a longtemps le stade d’être qualifiées comme des petites capitalisations.
Quand ça se produit, ce sont généralement les investisseurs en capital de risque, ceux ayant investi lorsque l’entreprise était privée, qui empochent les rendements les plus intéressants. Ces rendements auraient pu revenir aux investisseurs de microcaps si l’entreprise avait fait le choix de s’inscrire en bourse plus tôt.
Devant ce phénomène, les investisseurs de microcaps pourraient être tentés de se tourner vers des portails de financement participatif en capital comme FrontFundr et GoTroo afin d’investir dans des start-ups privées.
Cet article nous a d’ailleurs été inspiré par le lancement de la campagne de financement participatif en capital de Hardbacon sur le portail GoTroo. Certains d’entre vous se souviendront que son PDG Julien Brault avait présenté sa start-up Hardbacon lors d’un de nos cocktails 5à7 qui avait pour thème les fintechs.
La fintech montréalaise, qui commercialise une app d’analyse de portefeuille et de planification financière, semble avoir un potentiel intéressant. Et sa campagne semble avoir un certain succès également. Près de quatre semaines après ses débuts sur GoTroo, elle a déjà récolté 153 398$ auprès de 219 investisseurs.
Ceci étant dit, il s’agit malgré tout d’une entreprise qui se trouve au stade de l’amorçage et qui pourrait prendre plusieurs années avant d’être prête à s’inscrire en Bourse, et ce, si elle a le succès escompté.
Avant de plonger dans l’arène du financement participatif en capital, il est important de bien comprendre de quoi il est question.
Qu’est que le financement participatif en capital?
Avant la légalisation du financement participatif en capital, seuls les investisseurs accrédités (revenus annuels de 200 000$ et plus, ou plus de 1 millions $ en actifs financiers) pouvaient investir dans des start-ups privées. Les choses ont changé depuis deux ans, avec l’établissement d’un cadre réglementaire ayant permis l’émergence de portails comme GoTroo et FrontFundr.
Ces derniers sont autorisés à faciliter la vente de titres financiers par des entreprises à capital fermé comme Hardbacon. Par contre, plusieurs conditions doivent être respectées. Et ces conditions varient en fonction de la dispense choisie par les entreprises.
Celle choisie par Hardbacon, par exemple, est la dispense pour financement participatif des entreprises en démarrage. C’est la dispense qui est la moins contraignante pour les entrepreneurs puisqu’elle n’oblige pas les entreprises à produire des états financiers vérifiés. De plus, les entreprises n’ont pas besoin de créer un prospectus; seul un document d’offre relativement simple est exigé.
S’il est relativement facile de se prévaloir de cette dispense, les entreprises qui y recourent ne peuvent cependant pas accepter d’investissements de plus de 1500$ par investisseur (non accrédités) ni plus de 250 000$ par campagne, avec une limite de deux campagnes par année.
L’alternative, la dispense pour financement participatif (Règlement 45-108) vient pour sa part avec l’obligation de produire des états financiers vérifiés et d’utiliser un portail inscrit comme courtier. Cette dispense permet toutefois aux entreprises d’aller chercher jusqu’à 1,5 millions $ en financement par campagne (maximum d’une fois par année), et d’accepter des investissements d’un maximum de 2500$ par investisseur non accrédité. C’est cette dispense qu’avait utilisée Impak Finance pour sa campagne sur FrontFundr l’année dernière.
Financement participatif en capital: ça en vaut le coup?
Comme vous le savez probablement, les investissements dans les microcaps sont considérés comme plus risqués que les investissements dans les grandes capitalisations. Malgré tout, les microcaps sont des entreprises publiques qui ont le devoir de divulguer leurs états financiers ainsi qu’une panoplie d’informations susceptibles d’aider les investisseurs à prendre des décisions d’investissement éclairées.
En matière de financement participatif en capital, il y a peu d’informations divulguées et on se retrouve donc à devoir faire confiance aux entrepreneurs. Qui plus est, il n’y aucun marché pour revendre les titres qui ont été achetés, ce qui en fait forcément un investissement à très long terme.
En d’autres mots, on parle de placements très risqués et complètement illiquides. Et contrairement aux investissements dans les microcaps, on ne peut pas mettre des titres achetés sur un portail comme GoTroo dans un compte CELI, de sorte que le jour où l’entreprise sera acquise ou ira en Bourse et que vous vendrez, il faudra payer de l’impôt sur le gain en capital.
Est-ce à dire que le financement participatif en capital est un attrape-nigaud? Pas forcément. Il faut plutôt voir ce type d’investissement comme un billet de loterie. Il faut être prêt à perdre sa mise, mais si par bonheur l’entreprise dans laquelle vous avez investi finit par devenir le prochain Shopify, voire le prochain Facebook, vous pourriez faire un rendement exceptionnel… et vous vanter auprès de tous vos amis d’avoir investi dans la première ronde de financement de l’entreprise.
Avertissement
Cet article ne constitue ni une offre de vente ni une sollicitation d’offre d’achat de titres et il ne doit pas être considéré comme des conseils juridiques, fiscaux, financiers ou d’investissement. Espace MicroCaps n’est pas responsable de l’exactitude des renseignements fournis dans cet article, ni des pertes transactionnelles directes ou indirectes causées par les informations présentées.
Il est conseillé à tous de faire leurs propres analyses et demandes de renseignements et de consulter leurs propres conseillers professionnels en ce qui concerne les questions juridiques, fiscales, comptables et autres concernant l’acquisition, la détention ou la disposition d’un investissement.