John Cole |

Ma philosophie d’investissement

Article publié originalement en anglais sur le blogue Mispriced Markets, sous le titre My Investment Philosophy.

Mispriced Market est en partie un blogue, en partie une lettre d’investissement (gratuite) et en partie un centre de ressources pour les investisseurs. Son fondateur, John Cole, investit en bourse depuis plus de 20 ans et possède un historique de rendement phénoménal, ayant généré un rendement annuel composé de 38% au cours des 21 dernières années avec son portefeuille personnel. L’objectif de John est de partager sa passion pour l’investissement valeur et la recherche d’aubaines en bourse.

Cet article est le premier d’une série de tutoriels à propos de l’investissement valeur ayant été publiée sur Mispriced Markets. Traduction par Mathieu Martin

 

Une introduction à l’investissement valeur

Vous pouvez aborder l’investissement sous différents angles. Certains investisseurs se concentrent sur les dividendes. D’autres sont attirés par les entreprises en croissance. Les adeptes de l’analyse technique passent leur temps à rechercher des figures sur les graphiques boursiers tandis que les analystes fondamentaux examinent les états financiers. Il existe des investisseurs passifs et des investisseurs actifs. Des «day traders» et des investisseurs «buy and hold». Même au sein de la communauté d’investisseurs qui se considèrent de type valeur, il existe différentes approches. Certains se concentrent sur les bénéfices nets tandis que d’autres mettent l’accent sur la valeur comptable ou les flux de trésorerie disponibles. Les adeptes de Warren Buffett passent leur temps à chercher des avantages compétitifs forts tandis que les disciples de Peter Lynch recherchent la croissance à un prix raisonnable. Les adeptes de Joel Greenblatt et sa formule magique passeront leur temps à calculer le rendement sur le capital et les valeurs d’entreprises.

Je ne parlerai pas de toutes ces idéologies concurrentes. Je vais parler de la façon dont moi j’investis. Avec quelques améliorations relativement mineures en cours de route, j’investis essentiellement de la même manière depuis plus de 20 ans. Et mon historique de rendements démontre que mon approche est aussi bonne que toute autre et, en fait, bien meilleure que la plupart des autres.

 

Les deux éléments d’une stratégie gagnante d’investissement valeur

Je suis un investisseur de valeur dans l’âme. Cela signifie essentiellement deux choses. Premièrement, je passe le temps nécessaire pour évaluer ce que je considère être la valeur intrinsèque d’une entreprise, ce que j’appelle la «juste valeur». C’est le prix qu’un investisseur privé serait prêt à payer pour acheter l’entreprise au complet. Deuxièmement, je recherche des entreprises dont les actions se transigent à un rabais significatif par rapport à cette «juste valeur».

Pour avoir du succès à ce jeu, vous devez être raisonnablement doué pour évaluer la valeur intrinsèque d’une entreprise. Ensuite, vous devez passer du temps à fouiller tous les recoins afin de trouver les rares entreprises qui se vendent pour beaucoup moins que cette valeur. Quand je trouve un tel titre, je l’achète. Et puis j’attends. J’attends peut-être 6 mois, ou un an, ou deux, ou trois. Mais la plupart du temps, si j’attends assez longtemps, d’autres investisseurs commencent à percevoir la valeur que j’ai vue et achètent le titre jusqu’à ce que son prix atteigne un niveau plus raisonnable. À ce moment, je vends ma position et je passe à la prochaine opportunité. On lave, on rince et on répète. Faites cela sans arrêt et votre portefeuille grandira et prospérera.

 

Acheter des entreprises, pas des titres

J’utilise quelques astuces mentales afin de m’aider à structurer correctement mes décisions d’investissement. Quand j’achète une action, j’aime penser que j’achète toute l’entreprise. Les gens qui ne me connaissent pas sont parfois troublés parce que je parle des entreprises que je possède et non des actions que j’ai achetées. Ils sont probablement en train de regarder par-dessus mon épaule pour essayer de repérer ma Lamborghini. Mais même si je conduis une Toyota quelconque et que je n’ai pas les moyens d’acheter des entreprises entières, lorsque j’achète des actions, je deviens tout de même en partie propriétaire de ces entreprises.

Pour moi, le marché boursier a toujours semblé presque trop beau pour être vrai. En appuyant simplement sur un bouton, je peux acheter des parts d’une entreprise rentable et en croissance. Avec un petit mouvement de mon index, je deviens instantanément un copropriétaire de cette entreprise. À partir de ce moment, essentiellement tout le monde, du directeur général au commis qui s’occupe du courrier, travaille maintenant pour moi. Pendant que je skie ou que je prends un café au restaurant du coin, il y a un individu quelque part avec un MBA de Harvard qui travaille matin et soir pour que mon entreprise soit la plus performante possible. Et ce n’est pas tout. Je peux choisir parmi un éventail de milliers d’entreprises différentes. Si je n’aime pas ce que l’une d’entre elle fait, je peux passer à la suivante. Si mes recherches ont été bien faites, je peux acheter des participations dans des entreprises rentables, bien gérées et offrant beaucoup de potentiel, et je peux acheter ces participations à des prix imbattables! Si les choses ne se passent pas aussi bien que prévu, je ne perds pas de sommeil à me soucier de comment je garderai mes usines en vie ou de la façon dont je payerai mes employés la semaine prochaine. D’un simple clic, je peux vendre mes parts aussi facilement que je les ai achetées et placer mon argent dans une situation plus prometteuse.

Après toutes ces années, j’ai toujours de la difficulté à croire que le système fonctionne vraiment de cette façon. D’une certaine manière, il me semble presque que c’est trop beau pour être vrai. Bien sûr, il y a des pièges. Investir n’est pas si facile que cela. Mais ce n’est pas sorcier non plus. À mon avis, la réussite en investissement commence par ce concept fondamental: lorsque vous achetez une action, vous n’achetez pas un morceau de papier, un symbole boursier ou un billet de loterie, vous achetez une part d’une entreprise très réelle. Vous devenez copropriétaire de cette entreprise et ce n’est pas à prendre à la légère.

 

Acheter pour le long terme

Je vais encore plus loin dans cette réflexion et je considère généralement que je suis en train d’acheter une participation plus ou moins permanente dans une entreprise. J’aime acheter avec l’idée de demeurer propriétaire d’une entreprise pour les 10, 15 ou 20 prochaines années, pendant les périodes de prospérité et de récession. Si je ne suis pas à l’aise de posséder une entreprise sur le long terme, je ne l’achète pas. Si quelque chose venait à mal aller, je ne me dis pas que je serai capable de «sortir à temps»; j’assume que je vais couler avec le bateau jusqu’à ce que mon investissement vaille zéro. (Et, en fait, c’est déjà arrivé à plusieurs reprises.)

Cette façon de formuler vos décisions d’investissement vous conduit naturellement à faire des choix très sains. Il est beaucoup moins probable que vous preniez une chance avec une start-up qui n’a pas fait ses preuves. Vous accorderez une attention particulière aux risques associés à un investissement et à la solidité financière des entreprises que vous achetez. Si vous vous concentrez sur les perspectives à long terme d’une entreprise, vous n’aurez pas besoin d’espérer qu’un «plus idiot» passe par là et vous rachète vos parts à profit, vous permettant de sortir rapidement.

L’un des principaux avantages (et il y en a beaucoup) que possède un petit investisseur privé est sa capacité d’adopter une perspective à long terme. Tant d’investisseurs et tellement des principes de Wall Street sont axés sur la gratification immédiate et les résultats à court terme. Si vous adoptez une vision à long terme, vous pouvez trouver des opportunités incroyables que tous les myopes ont manquées.

 

Tout dépend du prix que vous payez

J’achète donc des entreprises entières et je les achète pour le long terme. (Ou du moins, c’est le processus mental que j’utilise.) La prochaine question cruciale est de savoir quel prix dois-je payer pour ces entreprises? Je gère généralement un petit portefeuille concentré d’une douzaine de titres. À l’exception de ma maison, toute ma valeur nette est liée à cette poignée d’entreprises. Compte tenu de cela, le prix que je paye pour ces entreprises revêt une importance cruciale. Surpayer, même pour seulement quelques-unes de ces positions, peut nuire considérablement à mes résultats à long terme.

Pour un investisseur de valeur, le prix payé est plus important que l’entreprise achetée. Il existe des milliers d’entreprises sur le marché (des dizaines de milliers si vous êtes prêt à vous aventurer plus loin). Il y a des superbes entreprises, des bonnes entreprises, des entreprises médiocres et des catastrophes à venir. Il est possible de mettre un juste prix sur toutes ces entreprises. La superbe entreprise va évidemment valoir beaucoup plus que celle qui est médiocre, mais les deux ont de la valeur. La superbe entreprise peut être un investissement terrible si le prix payé est trop élevé, et l’entreprise médiocre peut s’avérer un investissement formidable si le prix payé est suffisamment bas. J’ai acheté des superbes entreprises. J’en ai acheté des médiocres et à quelques reprises, j’ai même acheté des catastrophes à venir. Dans chaque cas, je me suis mis à la place d’un investisseur qui achèterait l’entreprise en entier et qui s’y accrocherait jusqu’à la mort, puis je me suis demandé quel prix un tel investisseur serait prêt à payer pour cet investissement? Quel serait un prix «juste»? Et ce n’est que si je peux acheter le titre à un rabais significatif par rapport à cette juste valeur que j’appuie sur la gâchette.

 

Les superbes compagnies ne sont pas toujours des superbes investissements

C’est le concept clé qui échappe à beaucoup d’investisseurs. Ils trouvent de belles entreprises et croient que ce seront d’excellents investissements, mais ce n’est pas le cas. Les deux sont des choses très différentes. Imaginez que vous achetiez une entreprise en entier. Imaginez que vous ayez passé des mois à rechercher diverses entreprises pour finalement en trouver une qui vous plaise vraiment, avec beaucoup de potentiel à long terme. Iriez-vous ensuite voir le propriétaire pour lui dire: «J’aime votre entreprise et j’aimerais l’acheter. Voici un chèque en blanc. Vous avez juste à écrire ce que vous voulez comme montant.» Bien sûr que non! Et pourtant, c’est exactement la façon dont plusieurs investisseurs approchent la situation. Ils trouvent une entreprise qui leur plaît et achètent les actions sans se soucier de savoir si le prix qu’ils paient est proportionnel à l’entreprise qu’ils achètent.

Une approche plus axée sur la valeur serait de trouver une entreprise que vous aimez. Après avoir fait des recherches approfondies afin de pouvoir bien évaluer le juste prix à payer, allez voir le propriétaire et offrez-lui 25% de moins. S’il refuse, passez à une autre entreprise et essayez à nouveau.

 

40% de rabais

Sur les marchés boursiers, j’ai constaté que si je cherche assez longtemps et mets suffisamment d’efforts, je peux généralement trouver assez d’entreprises pour remplir mon portefeuille en utilisant un seuil de 40% de rabais par rapport à ma cible de la juste valeur. Donc, si je pense qu’un titre a une juste valeur de 10$, je voudrai l’acheter pour 6$. Bien sûr, j’aimerais bien pouvoir l’acheter à 5$ ou 4$ mais, de façon réaliste, le marché offre rarement des opportunités aussi extrêmes. Le seuil de 40% de rabais est ce qui m’a permis de battre le marché année après année par un grand écart depuis plus de 20 ans maintenant. Si je n’achetais pas à rabais, je devrais m’attendre à obtenir les mêmes rendements que tout le monde à long terme. Ça ne changerait rien que les entreprises que j’achète soient bonnes ou mauvaises. Si je payais le «juste prix» pour chacune des entreprises que j’ajoutais à mon portefeuille, je n’aurais aucune raison de penser que mes performances dépasseraient celles du marché en général.

Le rabais par rapport à la valeur intrinsèque est l’ingrédient secret; c’est ce qui engendre des rendements supérieurs. La plupart des titres ne se transigent pas à rabais. Après avoir examiné tous les chiffres, vous en arriverez généralement à la conclusion que la plupart des titres que vous évaluez sont offerts à des prix raisonnables. Le marché est remarquablement efficace pour fixer le prix des actions. La recherche d’informations par des milliers d’investisseurs qui agissent de manière indépendante fait du très bon travail en matière de fixation de la valeur des titres. Mais si vous cherchez assez longtemps, vous finirez par trouver des titres dont les prix ont suffisamment dévié par rapport à leur juste valeur, vous permettant ainsi d’obtenir les rendements supérieurs que vous recherchiez.

Vous avez trouvé votre mispriced market!

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