Mathieu Martin |

Quand vendre: 8 raisons pour se départir d’un titre

Vous arrive-t-il d’avoir de la difficulté à savoir quand vendre un titre? Si vous êtes comme la majorité des investisseurs, vous trouvez probablement qu’il est plus difficile de vendre que d’acheter.

Les ressources abondent au niveau des stratégies et des critères pour acheter un titre, mais qu’en est-il de la vente? Est-il nécessaire d’avoir une stratégie?

«Notre période de détention favorite est pour toujours.»

– Warren Buffett

Buffett ne vend donc jamais? Celui-ci mentionne également que si vous n’êtes pas à l’aise de détenir une entreprise pendant dix ans, vous ne devriez pas la détenir pendant dix minutes. Essentiellement, ce que Buffett veut nous faire comprendre est qu’en achetant seulement des entreprises de haute qualité, un investisseur peut attendre patiemment que son investissement fructifie pendant des années à mesure que l’entreprise exécute avec succès.

Bien que je n’aie pas l’intention de remettre en question les enseignements de M. Buffett, je crois qu’il est nécessaire de faire une distinction lorsqu’il s’agit des microcaps. Comme les microcaps sont généralement des entreprises en démarrage ou opérant dans des niches de marché très spécifiques, leur situation peut changer rapidement et il est nécessaire de les surveiller adéquatement.

«Les petites microcaps évoluent de différentes façons, et beaucoup de ces façons ne sont pas positives. Vous ne pouvez pas acheter et oublier, vous devez acheter et vérifier, et plus l’entreprise est petite, plus vous vérifiez souvent.»

– Ian Cassel, Achetez et vérifiez

 

Plusieurs situations peuvent survenir où il nécessaire de considérer la vente d’un titre. Voici les huit plus communes que j’ai rencontrées au fil des années :

 

1. Vendez pour investir dans une meilleure opportunité

Il s’agit de ma raison préférée pour vendre un titre. Lorsque j’évalue mon portefeuille, je considère non seulement la qualité des entreprises qui le composent, mais je compare aussi en tout temps avec ma liste de titres à surveiller (ceux que je ne détiens pas encore). Chaque titre dans mon portefeuille est en compétition avec ceux de ma liste de titres à surveiller et doit mériter sa place.

Il m’arrive de dénicher de nouvelles opportunités qui sont simplement trop attrayantes pour ne pas les inclure dans mon portefeuille. Si je ne dispose pas de suffisamment d’encaisse disponible, je dois alors vendre le titre le moins intéressant que je détiens afin de faire de la place pour le nouveau venu.

 

2. Vendez si les résultats financiers ne sont pas conformes à vos attentes

Lorsque vous investissez dans une entreprise, il est généralement conseillé d’en estimer la valeur intrinsèque d’abord (du moins, si vous êtes un adepte de l’analyse fondamentale). Ceci implique d’estimer les flux de trésoreries que l’entreprise sera en mesure de dégager dans le futur grâce à ses opérations.

Si une entreprise livre des résultats qui sont en deçà de vos attentes trimestre après trimestre, il faut remettre votre thèse d’investissement en question. Est-ce que les perspectives sont toujours aussi intéressantes que vous l’aviez estimé au départ? Est-ce que le ratio risque/rendement potentiel est toujours attrayant?

 

3. Vendez si le bilan présente trop de risques

Il vous arrive peut-être parfois d’investir dans des entreprises qui ne sont pas encore profitables, ou qui l’étaient mais qui connaissent présentement des difficultés. Une compagnie qui ne génère pas de profits doit avoir un bilan solide avec suffisamment d’encaisse pour continuer d’opérer. Elle doit être en mesure de payer ses employés et ses fournisseurs, mais aussi de rembourser ses dettes si elle en a.

Une entreprise qui ne dispose pas de suffisamment d’encaisse pour continuer d’opérer au cours des douze prochains mois, au minimum, présente des risques importants. Elle devra possiblement lever du capital additionnel via l’émission de nouvelles actions ou de dette. Dans les deux cas, il est difficile de prédire à quelles conditions ces financements seront réalisés. Selon mon expérience, ces situations sont avantageuses pour les investisseurs qui viennent à la rescousse de l’entreprise, et non pour les actionnaires existants.

Si le bilan présente un risque important de refinancement, il est parfois plus sage de vendre et d’attendre que la situation se règle. Cela procure deux avantages : vous pouvez juger si vous êtes satisfait de la solution, et vous pouvez faire partie de la solution et réinvestissant directement dans le financement si les termes de celui-ci sont avantageux.

 

4. Vendez si la nature de l’entreprise change

Parfois, vous investissez dans une entreprise parce que vous voyez un potentiel au niveau du modèle d’affaires, d’un produit ou d’un service spécifique, du PDG ayant un historique de succès, ou une foule d’autres raisons.

Et parfois, les choses changent drastiquement par la suite. Le modèle d’affaire s’avère être un échec et l’entreprise pivote vers une nouvelle stratégie. La division dans laquelle vous voyiez un fort potentiel est vendue. Le PDG à succès accepte une offre d’emploi plus alléchante ailleurs. L’entreprise procède à une acquisition majeure dans un domaine que vous ne connaissez pas.

Si l’entreprise change et qu’elle ne correspond plus à vos critères, il est temps de passer à autre chose.

 

 

5. Vendez si le management est malhonnête

La vie est trop courte pour investir dans une entreprise dirigée par quelqu’un de malhonnête. Il existe des milliers d’entreprises publiques en Amérique du Nord. Ne perdez pas votre temps avec les pommes pourries.

Chaque personne a son propre niveau de tolérance et sa définition quant à la malhonnêteté. Pour ma part, je n’investis pas dans une équipe de direction qui :

  • Fait des fausses promesses et qui n’exécute pas par la suite
  • Utilise une comptabilité créative afin de manipuler les états financiers
  • A un historique de vol ou de fraude
  • Tente de présenter ses qualifications et ses réalisations passées sous un faux jour
  • Divulgue de l’information privilégiée de façon sélective à certains investisseurs

 

6. Vendez si le management n’agit pas dans votre meilleur intérêt

L’un de mes critères importants lors de l’achat est que les intérêts des dirigeants soient alignés avec les miens, c’est-à-dire que ceux-ci détiennent une participation importante en actions et qu’ils se rémunèrent de façon modeste. Lorsque l’inverse se produit, il peut s’agir d’une raison pour vendre.

Je ne suis donc pas friand des salaires extrêmement élevées (en comparaison avec des entreprises similaires du même secteur), des bonus exagérés et de l’utilisation abusive d’options, entre autres choses. Je dois avoir la conviction que les actionnaires seront les ultimes bénéficiaires des succès de l’entreprise, pas seulement le management via une rémunération exorbitante.

 

7. Vendez si un titre est surévalué

Soyez très prudent avec ce critère. Un titre qui apparaît surévalué l’est probablement pour certaines bonnes raisons : un historique de succès, un fort potentiel à long terme, des avantages compétitifs solides, etc. Essentiellement, les entreprises de haute qualité ont le potentiel de paraître très chères à l’occasion si on regarde des ratios traditionnels de valorisation.

Il ne s’agit pas nécessairement d’une raison pour vendre en soi. Cela dit, parfois un titre devient surévalué parce que le sentiment positif des investisseurs à son égard est poussé à l’extrême. Il faut faire attention et être capable de reconnaître lorsqu’il n’y a plus de sceptiques par rapport à une entreprise. Lorsqu’un titre semble surévalué et que tout le monde s’entend pour dire qu’il continuera de s’apprécier, c’est probablement le moment d’être sur ses gardes.

Pour les partisans de l’analyse technique, un graphique qui monte de façon parabolique est généralement un signe que le sentiment positif devient extrême. Attention, car la chute subséquente est souvent brutale.

NASDAQ lors de la bulle technologique

 

8. Vendez si vous ne savez plus comment évaluer l’entreprise

Il vous arrivera peut-être parfois de détenir un titre et de ne pas trop savoir comment bien l’évaluer. Peut-être l’avez-vous acheté parce que vous pensiez bien comprendre l’entreprise, mais que vous réalisez que c’était une erreur. Peut-être que vous avez simplement suivi le conseil d’un ami. Peut-être que vous vouliez profiter d’une tendance haussière dans un secteur qui ne vous est pas familier (crypto-monnaies, cannabis, ressources naturelles, etc.).

Peu importe la raison, il est important de savoir en tout temps ce que vous détenez et de bien le comprendre. Si ce n’est pas le cas, comment arriverez-vous à prendre une bonne décision par rapport au titre dans le futur? Si vous n’avez aucune idée quand ou pourquoi vendre, le meilleur moment est probablement maintenant.

 

Seriez-vous acheteur aujourd’hui?

Il s’agit d’une question intéressante à se poser afin de mettre les choses en perspectives. En supposant que vous n’étiez pas déjà actionnaire de l’entreprise, seriez-vous acheteur aujourd’hui, au prix actuel? Si ce n’est pas le cas, questionnez-vous à savoir pourquoi le titre se trouve alors dans votre portefeuille.

Au final, les raisons pour vendre sont bien souvent des raisons pour ne pas acheter au départ. Si vous disposez d’un processus d’investissement solide avec des critères bien définis lors de l’achat, ces critères devraient également vous guider lors de la vente. Surveillez les signaux d’alarme de façon continue pour les entreprises que vous détenez.

Si vous avez un jour la chance de dénicher une entreprise exceptionnelle, en bonne santé financière, avec un fort potentiel, un produit ou un service simple à comprendre, un management honnête et compétent, et que la valorisation demeure toujours suffisamment intéressante, alors vous aurez peut-être l’opportunité de faire un Warren Buffett de vous-même en détenant l’entreprise pour toujours. Autrement, gardez l’œil ouvert pour des raisons de vendre!

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